COP25 Madrid : La France regrette un manque d’ambition climatique malgré certaines avancées obtenues dans l’accord

Le Lundi 16 décembre 2019

La France, qui a porté durant toute la COP 25 une position exigeante et volontariste, à la hauteur des défis, relève les avancées obtenues à la COP25. Elles vont contribuer à la mise en œuvre de l’accord de Paris, et à l’action renforcée des Etats.

Cependant, au vu de l’urgence climatique et des attentes des citoyens, la France regrette que les gouvernements ne soient pas allés assez loin dans leurs engagements. Durant toutes les négociations, la France s’est mobilisée pour appeler à l’ambition et ne pas accepter de recul de nos engagements, pour remobiliser toutes les parties en vue d’une année 2020 qui s’annonce essentielle.

Depuis le 2 décembre dernier, 196 pays étaient réunis à Madrid pour la 25ème Conférence des parties (COP), sous présidence chilienne et organisée de main de maître par l’Espagne, dans le but de finaliser les règles d’application de l’accord de Paris pour sa pleine mise en œuvre.

L’accord de Paris, adopté en 2015 lors de la COP21, a pour objectif de contenir la hausse des températures mondiales bien en deçà de 2°C et de s’efforcer de la limiter à 1,5 °C.

« Les scientifiques, dans les derniers rapports spéciaux du GIEC, nous ont montré à quel point il était urgent et important d’agir au plus vite. Partout dans le monde, nos concitoyens se mobilisent pour porter ce message d’urgence à agir. Malgré cela, l’ambition n’a clairement pas suffisamment été au rendez-vous dans la décision finale de la COP25. Cela ne doit pas nous faire renoncer : l’Union européenne vient d’annoncer son objectif d’être le premier continent au monde à atteindre la neutralité carbone d’ici l’année 2050. C’est historique. La France, en étant garant de l’esprit de l’accord de Paris, ainsi que l’Europe souhaitent maintenant entraîner davantage de pays dans cette voie. »

« La France et l'Union européenne ont été au rendez-vous lors de cette COP mais l'urgence de la bataille climatique n'est plus une priorité partagée par tous les pays. Face à cet état de fait, les pays ambitieux et les sociétés civiles du monde entier doivent redoubler d'effort et rester plus que jamais mobilisés. »

La COP25 de Madrid, qui a mis les océans au centre des discussions (« Blue COP »), a permis aux 196 pays réunis sous l’égide des Nations unies de trouver un consensus sur différents aspects importants des règles d’application de l’accord de Paris :

  • Les pertes et préjudices liés aux impacts croissants du changement climatique sur les pays les plus vulnérables (article 8 de l’accord de Paris).

Les pays participants à la COP25 ont pris la décision de mettre en place d’ici 2020 un groupe de travail chargé de définir un plan d’action pour faciliter la compilation et le partage d’informations sur les financements disponibles pour prévenir les risques climatiques et y faire face, notamment en clarifiant le rôle du Fonds vert pour le climat.

Le « réseau de Santiago » devra faciliter et élargir l’assistance technique des pays en développement, afin de mieux se prémunir contre les risques et de faire face aux pertes et dommages liés aux changements climatiques. Cela constituait une demande forte de la part des pays vulnérables, et il était important d’y répondre.

  • L’importance du multilatéralisme et du rôle de la science (rapports spéciaux du GIEC sur les terres et les océans) pour avoir une action plus rapide et plus forte afin de réduire les risques climatiques (décisions de la COP25, aussi appelées « 1/CP25 »)

L’accord signé aujourd’hui reconnaît l’importance d’une action plus rapide et plus forte pour réduire les risques climatiques, notamment à l’appui des derniers rapports spéciaux du GIEC. Il souligne le besoin de traiter les enjeux de perte de biodiversité et de changement climatique de façon intégrée. Il annonce l’organisation d’un dialogue sur l’océan et le changement climatique ainsi qu’un dialogue sur les terres et l’adaptation.

Cette meilleure prise en compte de la biodiversité et du rôle de l’océan sont des messages positifs pour 2020, notamment pour avancer à la fois sur la COP26 Climat et la COP15 Biodiversité.

  • L’urgence croissante d’une ambition renforcée (décision « 1/CMA2 »)

Cette décision engage les pays Parties à l’accord de Paris à reconnaître l’urgence croissante d’une ambition renforcée et rappelle les engagements attendus de la part des pays en 2020 en termes de communication ou d’actualisation des contributions déterminées au niveau national (NDC) et invite à la publication de stratégies de long terme. L’adaptation y occupe une place croissante.

Cet appel à l’ambition était essentiel en vue d’accroître la mobilisation de toutes les Parties dans la perspective de la COP26, qui sera déterminante. A ce titre, l’accord obtenu en Conseil européen les 12 et 13 décembre derniers, sur l’atteinte d’un objectif de neutralité carbone à horizon 2050, a donné le signal de l’ambition climatique de l’Union européenne en cette fin de COP.

  • L’adoption d’un nouveau plan d’action sur le genre

Un nouveau plan d’action sur le genre a été adopté pour une durée de 5 ans. Il porte notamment sur le leadership des femmes dans le domaine de la lutte contre le changement climatique et l’accès des femmes aux financements verts.

  • L’agenda de l’Action

Le rôle important des acteurs non-étatiques dans l’atteinte des objectifs climatiques est reconnu. La désignation de champions de haut-niveau est confirmée jusqu’en 2025, de même que l’organisation d’un évènement annuel de haut-niveau. Les champions sont invités à explorer des pistes d’amélioration de l’agenda de l’Action pour augmenter l’ambition.

La prolongation de l’agenda de l’action est un signal important pour toute la communauté internationale : il faut continuer à agir concrètement, à tous les niveaux, pour mettre en œuvre l’accord de Paris.

  • Les finances

Les Parties ont réussi à s’accorder sur les orientations à donner au Fonds environnemental mondial, au Fonds d’adaptation ainsi qu’au Comité permanent des finances. Les discussions n’ont en revanche pas abouti sur le point d’agenda concernant la finance de long-terme au-delà de 2020, ne remettant pour autant pas en cause leur poursuite à l’avenir. Les orientations à donner au Fonds vert pour le climat ont également fait l’objet de nombreuses discussions.

  • La science

Les pays réunis à Madrid reconnaissent le rôle de la recherche et de l’observation systématique (une référence aux derniers rapports spéciaux du GIEC a été incluse) et notent également avec inquiétude l’évolution récente du climat.

Les consultations de la Présidence chilienne sur l’article 6 de l’accord de Paris portant sur les mécanismes d’échanges de réduction d’émissions de gaz à effet de serre n’ont pas permis d’aboutir à un consensus, malgré l’implication de la France et de l’Union Européenne ; l’essentiel étant de ne pas accepter un accord qui aurait affaibli l’Accord de Paris, les Parties ont convenu de reporter la décision à 2020, afin de se donner de meilleurs chances d’aboutir à une décision ambitieuse et préservant l’environnement.

Cependant même sans l’article 6, l’accord de Paris reste opérationnel : il est en effet un complément de l’ambition, mais pas une condition de l’ambition. Cela n’empêchera pas les Parties de commencer à entreprendre leurs engagements domestiques.

L’examen des règles de mise en œuvre de l’article 6 est dès lors reporté à la session des organes subsidiaires de juin 2020.

De même, les négociations sur les tableaux de rapportage du cadre de transparence sous l'accord de Paris sont reportées à la session de négociation de juin 2020. Ce système de rapportage constitue le socle de l'accord de Paris, devant assurer la transparence des émissions et des avancées des pays dans la mise en œuvre de leurs engagements.

Par ailleurs, la France a également profité de la COP25 pour poursuivre son action engagée par le président de la République lors du G7 de Biarritz en août et du Sommet Climat de New York organisé par le Secrétaire général des Nations unies en septembre 2019.

Même si la COP25 de Madrid n’a pas été aussi ambitieuse que ne l’auraient voulu l’Union européenne et la France, elle permet malgré tout aux pays des Nations unies de mettre le cap vers 2020. L’année qui arrive promet d’être déterminante pour la France et pour le monde afin de porter haut l’ambition climatique internationale, grâce à plusieurs rendez-internationaux sur le climat et la biodiversité (Congrès Mondial de la Nature de l’UICN à Marseille, COP15 Biodiversité de Kunming et COP26 climat de Glasgow).

Pour l’Union européenne, la prochaine étape est d’adopter rapidement la loi Climat proposée par la Commission européenne prévue pour le mois de mars, qui permettra de graver dans le marbre notre objectif commun de devenir le premier continent neutre en carbone à l’horizon 2050.

L’Union européenne est prête à assumer le leadership climatique mondial pour ouvrir le chemin vers plus d’actions rapides et efficaces afin de combattre les changements climatiques et préserver la biodiversité.

Que s’est-il passé pour l’accord de Paris depuis la COP21 de 2015 ?

Après son adoption en décembre 2015 (COP21) et son entrée en vigueur accélérée en novembre 2016 (COP22), les pays des Nations unies se sont réunis pour établir ses règles précises d’application. Celles-ci ont été quasiment toutes finalisées à la COP24 de Katowice en Pologne en décembre 2018.

Le but de la COP25 de Madrid était de se mettre d’accord sur une dernière règle de l’accord assez complexe, qui porte sur les mécanismes d’échanges de réduction d’émissions de gaz à effet de serre.

Cela a également été l’occasion de faire le point sur les efforts nationaux et internationaux en matière de lutte contre les changements climatiques.

Si nous voulons atteindre le principal objectif de l’accord de Paris, qui est celui de maintenir la hausse globale de la température bien en-deçà de 2°C d’ici la fin du siècle, nous devons faire plus et plus vite. Les efforts actuels, bien que positifs, sont largement insuffisants pour atténuer la crise climatique. Car même dans l’hypothèse où l’ensemble des Etats mettraient pleinement en œuvre l’ensemble des engagements annoncés en 2015 (contributions déterminées au niveau national), cet effort collectif placerait la planète sur une trajectoire de réchauffement mondial supérieur à 3°C d’ici la fin du siècle.

Lors de la prochaine COP26 de Glasgow en novembre 2020, chaque pays devra rehausser ses ambitions climatiques et nous devrons également nous assurer de la mise en œuvre effective de l’accord de Paris par la traduction des engagements de chaque pays dans des politiques publiques climatiques ambitieuses, mises en œuvre via des plans d’action nationaux.

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