La finance verte

Le Lundi 16 septembre 2019

L’action du secteur financier en faveur de la transition écologique et énergétique est engagée. L’enjeu est d’orienter les flux financiers publics et privés pour qu’ils soient compatibles avec les objectifs climatiques de l’accord de Paris. Le ministère initie et contribue à la réorientation des investissements en faveur de la transition écologique et énergétique par son action sur la finance verte.

Le financement de la transition écologique et énergétique en France

Le financement de la transition écologique et énergétique en France est opéré par les investissements entrepris par les pouvoirs publics (Etat, collectivités, institutions financières publiques, agences...), les ménages, les banques commerciales et les entreprises.

Sur le financement de la transition bas-carbone, l’I4CE – Institute for Climate Economics estime qu’il existe actuellement un déficit d’investissement pour mettre en œuvre la programmation pluriannuelle de l’énergie et la stratégie nationale bas-carbone. Par ailleurs, la France et les français investissent fortement dans les énergies fossiles défavorables au climat.

Du côté des pouvoirs publics, la France a déployé une gamme variée de dispositifs de soutien financier, qui sont principalement mis en œuvre par l’Etat, les collectivités territoriales, ainsi que les institutions financières et agences publiques, essentiellement dans le cadre de deux dispositifs d’investissement public : le programme d’investissements d’avenir et le grand plan d’investissement.

Pour combler le déficit d’investissements dans la transition écologique et énergétique en France, les pouvoirs publics français devront mobiliser des dispositifs financiers innovants permettant de favoriser les investissements verts.

Les exigences de reporting extra-financier : une transparence nécessaire

La reconnaissance des risques que le changement climatique, la perte de la biodiversité et l’érosion des ressources naturelles font peser sur le système économique et financier doit conduire les entreprises et les acteurs financiers à se doter d’un cadre de transparence pour mieux les mesurer, les comprendre et les gérer. Cet enjeu croissant a progressivement permis d’élargir les enjeux de reporting à d’autres critères que les seuls critères financiers.

La France a apporté une impulsion décisive à cet enjeu avec l’adoption de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte : l’article 173 enjoint les entreprises, les investisseurs et leurs gestionnaires d’actifs, à publier annuellement les informations sur leur prise en compte des risques liés au changement climatique et des objectifs de transition bas-carbone.

La disposition VI de l’article 173 de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte oblige les investisseurs à rendre compte de la prise en compte des critères dits « ESG » (environnemental, social, et de qualité gouvernance), en particulier de prise en compte des risques liés au changement climatique, dans leurs décisions d'investissement, ainsi que des moyens mis en œuvre pour contribuer à la transition énergétique et écologique.

La France est ainsi devenue le premier pays au monde à rendre obligatoire la publication, par les investisseurs, d’informations relatives à leur contribution aux objectifs climatiques et aux risques financiers associés à la transition énergétique et écologique.

Cet article a beaucoup inspiré les travaux de la Task force on Climate-related Financial Disclosure qui promeut, au niveau international, un renforcement des exigences de transparence et une meilleure prise en compte des critères dits « ESG » par les entreprises et les investisseurs. Ces recommandations, basées sur le modèle français, ont ensuite été reprises par la Commission européenne dans son « plan d’action sur le financement de la croissance durable », qui a notamment abouti à l’adoption du règlement sur la publication d’informations relatives aux investissements durables et aux risques en matière de durabilité en mars 2019.

L’enjeu aujourd’hui est à la fois de mettre au point des méthodologies de reporting et des indicateurs mesurant l’impact des risques environnementaux qui permettront de définir des stratégies d’investissement cohérentes avec les objectifs environnementaux de long terme et de s’assurer de leurs mises en œuvre.

En juin 2019, les ministères l'environnement, de l’économie et des finances, l’autorité des marchés financiers et l’autorité de contrôle prudentiel et de régulation ont publié le bilan de l’application des dispositions du décret du 29 décembre 2015 issu de l’article 173-VI.

L'obligation verte souveraine de la France

Lors de la COP21 en 2015, la France s’est engagée à émettre des obligations vertes. En janvier 2017, l’État, par l’intermédiaire de l’Agence France Trésor, a émis une obligation verte adossée à des dépenses en faveur de la transition énergétique  et écologique d’un montant initial de 7 milliards d’euros sur 22 ans, l’OAT verte (obligation assimilable du Trésor verte).

Au-delà du titre financier lui-même, l’apport de l’obligation verte pour le marché est de fournir des évaluations d’impact environnemental des dépenses qui lui sont éligibles, ce qui permet d’enrichir les pratiques de mesure d’impact environnemental des produits financiers verts.

L’obligation verte a été construite autour de quatre objectifs environnementaux nationaux :

  • La lutte contre le changement climatique.
  • La protection de la biodiversité.
  • La réduction de la pollution de l’eau, de l’air et du sol.
  • L’adaptation au changement climatique.

Comme prévu lors de l’émission, des travaux d’évaluation sont menés sur les impacts environnementaux des dépenses éligibles de l’obligation verte. Sont éligibles les dépenses de fonctionnement, fiscales, d’intervention et d’investissement dans les bâtiments, les transports, l’énergie, les ressources vivantes, l’adaptation et la lutte contre la pollution. L’obligation verte s’inspire des meilleures pratiques du marché : transparence sur l’allocation du produit obligataire, sélection des projets et évaluation, communication de données (ou reporting)... Elle s’appuie sur le référentiel du label Greenfin et s’appuiera prochainement sur le futur standard européen sur les obligations vertes. L'Agence France Trésor a par ailleurs adhéré aux Green Bonds Principles, qui édicte des principes destinés à définir un standard international en matière d’émissions d’obligations vertes.

Lors de l’émission, le gouvernement français s’est engagé à fournir trois types de reporting : un rapport annuel sur l’allocation et la performance des indicateurs ainsi qu’un rapport d’impact ex post à une fréquence adéquate. Ce dernier représente un type de reporting inédit pour une obligation verte permettant l’établissement de standards élevés au sein de ce marché. L’objectif est d’évaluer les impacts environnementaux des dépenses éligibles de l’obligation verte. Ce rapport est placé sous la supervision d’un conseil d’évaluation, composé d’experts internationaux indépendants de haut niveau qui définissent les lignes directrices et la fréquence des rapports d’impact et évaluent la qualité des évaluations et la pertinence des résultats. Le ministère de la transition écologique et solidaire est en charge du secrétariat de ce conseil avec la direction générale du Trésor et réalise une partie des études d’impact, dont l’indépendance est garantie par la présence de référents académiques externes. L’ensemble des documents publiés sont disponibles sur le site de l’Agence France Trésor.

Les labels pour les produits financiers

Le développement de la finance verte s’est accompagné de la création de différents labels, permettant à la fois de donner de la visibilité aux actifs verts et de pouvoir suivre les flux financiers allant vers la transition énergétique et écologique. En France, il existe trois labels dédiés à la finance verte.

La supervision, la gestion des risques bancaires et la stabilité financière

La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte comporte des dispositions relatives à la gestion des risques bancaires. Le secteur bancaire joue un rôle dans l’allocation des capitaux dans l’économie en fournissant des services financiers aux entreprises et aux ménages. Les établissements bancaires disposent ainsi d’engagements dans différents secteurs économiques.

Afin de faire émerger un système financier qui tienne suffisamment compte des enjeux climatiques, la France a adopté, dans le cadre de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, une série de mesures visant spécifiquement les banques. La disposition V de l’article 173 de cette loi demande la remise d’un rapport sur la mise en œuvre de tests de résistance réguliers représentatifs des risques associés au changement climatique. L’objectif est d’encourager les établissements bancaires à engager une réflexion sur les défis du changement climatique pour leurs activités.

Lors du One Planet Summit de décembre 2017, le NGFS (Network for Greening the Financial System), réseau regroupant banques centrales et organismes de supervision, s'est fédéré autour notamment de la Banque de France et de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution. Cette initiative doit permettre d’accélérer la prise en compte des enjeux climatiques dans la supervision financière, d’approfondir la coopération en matière de gestion des risques liés au changement climatiques et de mobiliser des outils permettant d’accélérer le financement dans la transition énergétique et écologique.

Le plan d’action européen sur la finance durable

En mai 2018, l'Union européenne a présenté son paquet législatif sur la finance durable dont l’objectif est d’aider à réorienter les flux financiers vers la transition écologique afin d’en assurer le financement. Les ministères des finances et de l’environnement sont étroitement associés aux discussions sur les trois premiers projets de textes législatifs :

  • Le règlement définissant des indices de référence « bas carbone » qui permettront aux gestionnaires de portefeuilles financiers d’étalonner leur performance carbone. Ce règlement est une modification du règlement existant sur les indices de références et n’inclut pas uniquement des dispositions liées à la thématique « bas carbone ». Il a été adopté en mars 2019 et entrera en vigueur fin 2019.
  • Le règlement sur la publication d'informations relatives aux investissements durables et aux risques en matière de durabilité, qui oblige les acteurs financiers à la transparence concernant l’intégration de risques environnementaux, sociaux et de gouvernance dans leur stratégie d’investissement.
  • Un règlement établissant une classification commune (ou « taxonomie ») des activités économiques « durables sur le plan environnemental ». Celle-ci permettra de qualifier de « verts », objectivement et sans conteste au niveau européen, les outils financiers qui permettront le financement desdites activités. Le premier volet « climat » du règlement devrait aboutir début 2020.

Les prix international sur le reporting climatique

Le prix international sur le reporting climatique est une initiative organisée conjointement par l’Ademe et le ministère, avec le soutien de la Commission européenne, d’Eurosif et de 2° Investing Initiative.

Ce prix vise à stimuler l'innovation et à reconnaître les meilleures pratiques en matière de reporting climatique des institutions financières internationales.

Les prix offrent aux institutions financières une excellente occasion de mettre en lumière les meilleures pratiques en matière de reporting climatique, de les partager, et de mettre en avant les entreprises leader dans ce domaine.

Les autres initiatives internationales

Deux ans, jour pour jour, après l’accord de Paris, le sommet One Planet Summit, organisé par le France le 12 décembre 2017, entendait poursuivre l’effort en rassemblant les acteurs de la finance publique et privée. Au cœur de cette journée, il a été question de la manière dont les acteurs engagés dans la finance publique et privée pouvaient innover pour soutenir et accélérer notre lutte commune contre le changement climatique.

Lors du One Planet Summit qui s’est tenu à New York en septembre 2018, le Président de la République a annoncé le lancement du One Planet Lab sous le pilotage de la France. Ce groupe est composé d’experts de haut niveau du secteur privé, des institutions financières ainsi que du monde académique. Le One Planet Lab a pour mission de proposer des solutions innovantes pour une coopération internationale sur les enjeux associés aux océans, au climat, à la biodiversité et au financement de la transition écologique. Cette initiative est née du constat de la faible capacité des institutions existantes au niveau international à accorder les États ainsi que les acteurs privés sur des engagements climatiques et plus généralement environnementaux, se traduisant par la mise en place des solutions concrètes. Les travaux du groupe s’organisent autour de quatre grandes thématiques : océan, climat, biodiversité et financement, elles-mêmes découpées en sujets stratégiques.

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