Intervention de Brune Poirson à la réunion avec les acteurs de la filière boisson pour la présentation de la charte « Verre, 100% solutions »

Le Vendredi 25 octobre 2019

Paris, le 25 octobre 2019

Seul le prononcé fait foi

M. le Ministre,
Messieurs les Présidents,
Mesdames, Messieurs les délégués généraux,
Mesdames, Messieurs les directeurs généraux,
Mesdames et Messieurs,

Bonjour,

Je suis ravie d’être parmi vous aujourd’hui. Merci pour votre présentation, merci pour vos engagements, merci tout particulièrement aux Brasseurs de France qui ont coordonné le travail. La charte que vous avez signée, combine des constats documentés, chiffrés et de nouvelles propositions, prouve que notre pays peut atteindre le zéro déchet non valorisé si tout le monde y met du sien. Mieux, que tout le monde peut y trouver son intérêt ! – entre nous, porter un projet de loi s’apparente souvent à un parcours du combattant, lorsque je rencontre des femmes et des hommes convaincus que le statu quo n’est pas la bonne stratégie en matière de transition écologique, je ne boude pas mon plaisir !

En 2018, lors du Salon de l’agriculture, je vous avais demandé ces engagements. J’avais réitéré ma demande, lors de l’édition 2019. Ils sont enfin là et je m’en réjouis !

Cette charte que vous nous présentez aujourd’hui est une contribution au travail de concertation initié dans le cadre de la FREC et du projet de loi Anti-gaspillage pour une économie circulaire. L’ensemble des acteurs de la chaîne de valeur s’est mis autour de la table et la robustesse du socle que vous avez forgé est un premier succès. Vous le savez depuis deux ans, je poursuis un objectif très clair : la transition de notre économie d’un modèle linéaire à un modèle circulaire. Il s’agit de tenir les engagements pris par le Président de la République (100% de plastique recyclé & réduire de moitié la masse de nos déchets mis en décharge d’ici 2025) mais surtout de rendre notre économie résiliente, que ce soit face aux aléas climatiques, ou économiques.

Je ne vous ferai pas l’offense d’un topo classique sur l’intérêt et les opportunités qu’offrent le passage à l’économie circulaire : votre charte rend très bien compte de votre conscience aigüe des enjeux environnementaux liés à la meilleure collecte et au meilleur traitement des déchets en verre. Ce que l’on conçoit bien s’énonçant clairement, pour paraphraser Nicolas Boileau, je sais que nous sommes ici entre initiés. J’entre donc dans le vif du sujet : vos propositions !

Dans les propositions que vous nous faites, il y a de belles avancées ! Je pense à :

L’objectif de 90% de verre collecté pour recyclage d’ici 2025 et 100% en 2029 (contre 78% aujourd’hui). Et au-delà de ces objectifs, le plan que vous comptez mettre en œuvre pour l’atteindre : densification des points d’apports volontaires dans les centres urbains, développement à la consommation hors-foyer de la collecte des emballages en verre, poursuite des efforts d’écoconception et d’allègement du poids des emballages.

J’attire votre attention sur un autre chiffre que nous souhaiterons suivre de près : le taux d’incorporation, qui est le taux réel de recyclage. Il n’est aujourd’hui que de 61%, d’après les éléments de l’ADEME. Je pense qu’il faut aller beaucoup plus loin et j’attends que chacun s’engage.

Un nouvel effort de sensibilisation au geste de tri, pour capter les 10kg de verre par habitant se retrouvant dans les ordures ménagères résiduelles chaque année.

L’idée de continuer à innover en y associant le geste de tri du verre à une cause citoyenne ou une gratification est une bonne idée pour que ce ne soit l’ensemble des Français qui trient systématiquement ses emballages en verre.

Vous pouvez vous appuyer pour cela sur les nouvelles solutions qui commencent à porter leurs fruits : je pense par exemple à « Clink » qui permet d’augmenter significativement les performances.

Pour garantir l’efficacité de ces engagements, j’insiste sur l’importance d’une collaboration étroite et efficace avec les collectivités territoriales. C’est elles qui opèrent dans les territoires, elles sont au contact des administrés et c’est ensemble qu’ils rendent opérationnels le système public de gestion des déchets. C’est donc aussi elles qui ont les moyens d’impulser un changement en profondeur des pratiques.

Par ailleurs – après les satisfactions, le sujet sur lequel nous gardons un gout d’inachevé… -  concernant vos engagements sur le réemploi je pense que vous pouvez aller encore plus loin.

Je comprends très bien que pour beaucoup d’entre vous, ce soit un saut dans l’inconnu, que cela ouvre le champ de nombreuses questions : quel modèle de production, de distribution, de collecte, de réutilisation ? Quelles relations avec mes fournisseurs, mes clients, mon impact environnemental ? Le réemploi est pourtant un formidable vecteur de changement dans le secteur de l’emballage, et la filière verre doit y voir une opportunité plus qu’une menace.

Il est en effet plus simple d’envisager les améliorations d’un dispositif (je pense par exemple à votre proposition d’augmenter le taux de recyclage) que de revisiter le fonctionnement du dispositif dans son ensemble. Mais j’insiste, il est indispensable de soutenir plus fortement les démarches volontaires de réemploi et de bousculer nos habitudes.

Votre idée de créer un Observatoire en partenariat avec l’Ademe, pour définir une juste trajectoire de croissance, me semble être un premier pas. Car il permettrait de capitaliser sur les bonnes pratiques et d’accélérer le déploiement de solution – notamment, en caractérisant le volume actuel du réemploi dans notre pays et ses spécificités. Néanmoins il faudra être attentif à ce que les données misent à disposition soient les plus transparentes et accessibles possible pour que l’ensemble des parties prenantes puissent les exploiter au mieux ;

Aujourd’hui, fort de ces propositions, il faut passer à l’action. Nous devons accélérer la transition de l’usage unique par habitude, au réutilisable par principe. Notamment, parce que le réemploi du verre peut participer à la baisse de nos émissions de CO2, à la lutte contre la pollution plastique et donc de l’atteinte de notre objectifs environnementaux.

Aborder l’enjeu du réemploi du verre, ne peut aller sans évoquer celui de la consigne sur les emballages. Chaque année, malgré les efforts sans relâche et les performances remarquables de certaines collectivités, ce sont a minima 200 millions de bouteilles d’eau et uniquement de bouteilles d’eau – je ne compte pas les canettes - qui se retrouvent dans la nature en France. Près de 7 milliards de bouteilles et canettes, sur les 16,6 milliards que nous consommons, ne sont pas recyclées et sont donc pour la plupart brûlées. Des matières différentes ont des contraintes de traitement différentes, cela tombe sous le sens. Ce qui m’intéresse, c’est de savoir ce qui en termes environnemental est le plus efficace.

C’est pour cela que dans le cadre des travaux sur le projet de loi Anti-gaspillage pour une économie circulaire, à la suite du Premier Ministre j’ai souhaité qu’une concertation soit lancée et j’ai commandé un rapport – qui est en cours - sur le sujet à Jacques Vernier. Dans ce cadre il a réalisé une étude d’impact qui attire l’attention sur les bonnes pratiques de nos voisins européens, mais également qui « fait les comptes » économiques et écologiques. Il a également tracé des pistes de mise en œuvre qu’il faut encore explorer, par exemple :

Un dispositif de consigne mixte, c’est-à-dire pour recyclage et pour réemploi, afin que le premier (le recyclage) finance l’autre (le réemploi). Trop souvent ces derniers mois nos détracteurs ont cherché à opposer consigne pour recyclage et consigne pour réemploi alors que se sont deux dispositifs complémentaires.

L’un sert l’autre : les machines sont mixtes pour que les citoyens n’identifient pas la machine de déconsignation comme une contrainte supplémentaire par rapport à son geste de tri dans le bac jaune mais comme une opportunité de passer de l’usage unique au réemploi. Vous l’aurez compris, nous voulons que la consigne pour recyclage basée sur un objet polluant à usage unique finance l’installation sur le territoire d’un dispositif conçu pour être mixte permettant ainsi à la consigne pour réemploi de renaître de ses cendres. Le travail de Jacques Vernier confirme notre intuition sur la consigne mixte et comment la consigne pour recyclage peut être une locomotive pour le réemploi.

Un objectif ambitieux de réemploi de la filière des emballages. Ce sera l’éco-organisme qui soutiendra financièrement les démarches volontaires pour atteindre cet objectif global de la filière. J’attends des acteurs concernés des propositions claires d’ici au débat parlementaire. Les chiffres ne sont pas encore définitivement validés mais en France, grâce au secteur du CHR (café hôtel restaurant), nous serions à environ 10% de réemploi. Et ce chiffre baisserait un peu plus chaque année. Cela interroge quand notre voisin Allemand dépasse les 40%;

Des sanctions fortes pour l’éco-organisme en charge de la consigne en cas de non atteinte des objectifs pour créer de réelles incitations.

Nous avons, vous l’aurez compris, encore du chemin à parcourir pour atteindre un niveau satisfaisant pour réduire la production de nos déchets, et en améliorer leur traitement dans notre pays. Vous le savez, nos concitoyens sont très attentifs aux moyens que nous leur donnons pour faire plus chaque jour en faveur de l’environnement. Et je sais que les élus aussi, comme l’examen du projet de loi au Sénat l’a démontré avec une demande unanime des sénateurs sur le réemploi.

Cet événement est pour moi l’occasion de dire avec beaucoup de clarté que le projet du gouvernement s’il a beaucoup été caricaturé, et on l’a vu très récemment, sous l’influence de lobbies puissants, a toujours porté la même ambition : mettre en place une consigne pour recyclage et réemploi.

Vos propositions peuvent devenir une brique majeure de la dynamique en faveur d’une accélération de la transition écologique. Et n’hésitez pas, si vous souhaitez rehausser encore l’ambition de votre charte à partir des propositions que je viens de formuler ou d’initiatives des ONG !

Ce que nous avons fait ensemble, Etat/entreprises/ONG, avec le Pacte plastique est une démarche qui porte ses fruits. Nos services, je tiens à remercier l’ADEME et la DGPR, sont à ce titre à votre disposition pour avancer concrètement. Et je le répète mais j’en finirai là : en visant le zéro déchet, c’est un vaste champ d’opportunité que nous ouvrons. Je compte sur vous pour vous en saisir !

Je vous remercie

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