La productivité des ressources

Le Lundi 23 octobre 2023

La croissance économique mondiale est étroitement dépendante de la consommation de ressources matérielles (ressources minérales, biomasse, ressources énergétiques fossiles). Or l’extraction, la production, l’utilisation et la consommation de ces ressources peuvent détériorer l’état des écosystèmes en contribuant à la dégradation des habitats, à la pollution chimique, ou aux émissions de gaz à effet de serre.

Parallèlement, la lutte contre la dégradation des milieux conduit à des modifications dans la structure de la consommation des matières : par exemple, le déploiement des énergies renouvelables, indispensables pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, est associé à une diminution des besoins en pétrole, en gaz et en charbon, mais également à une augmentation des besoins en biomasse, en acier, en cuivre, en métaux rares...

Les communautés scientifique et politique et les acteurs de la société civile qui se préoccupent des enjeux environnementaux et de la gestion des ressources naturelles reconnaissent de plus en plus que le niveau actuel de la consommation de ressources matérielles et de sa croissance ne pourront pas continuer dans le futur tant pour des raisons économiques qu’environnementales.

Une croissance économique moins dépendante des ressources matérielles constitue un élément essentiel d’une croissance plus soutenable. Il s’agit, d’une part, de consommer moins de ressources pour produire une quantité donnée (augmentation de la productivité des ressources) et, d’autre part, de réduire les impacts environnementaux associés aux prélèvements et à l’utilisation de ces ressources.

Qu’est-ce que la productivité des ressources ?

La productivité des ressources permet de décrire l’efficacité avec laquelle une économie transforme les ressources naturelles en produits utiles ou en richesses et les impacts environnementaux associés. La productivité des ressources est généralement mesurée par le produit intérieur brut rapporté à la quantité de matières consommées par la population présente sur le territoire pour ses besoins propres. Cet indicateur exprime la quantité de richesses produite par unité de matières premières effectivement consommées par la population présente sur le territoire français. Son évolution traduit un découplage entre le produit intérieur brut et la consommation de matières. Le produit intérieur brut augmente plus vite que la consommation de matières. Le découplage peut être relatif (la consommation de matières continue d’augmenter mais à un rythme moins rapide que le produit intérieur brut) ou absolu (la consommation de matières diminue).

Pourquoi augmenter la productivité des ressources ?

Il existe de nombreuses raisons pour augmenter la productivité des ressources :

  • Assurer la disponibilité des ressources dans le futur.
  • Réduire les impacts de la volatilité des prix des matières premières.
  • Augmenter la sécurité d’approvisionnement en particulier pour les pays importateurs de ressources naturelles.
  • Réduire les impacts environnementaux y compris les émissions de gaz à effet de serre.
  • Réaliser des économies : dans de nombreux cas, les bénéfices des mesures mises en œuvre pour utiliser les ressources de façon plus efficace sont supérieurs à leurs coûts.

C’est donc une préoccupation non seulement environnementale mais aussi économique.

La loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte fixe comme objectif d’augmenter de 30% la productivité des ressources entre 2010 et 2030.

Cela signifie qu’on se donne comme objectif d’augmenter de 30% la richesse créée par kilogramme de matière consommée en France entre 2010 et 2030. Cette loi comporte de nombreuses mesures visant à accélérer la transition vers l’économie circulaire, ainsi qu’à réduire notre consommation d’énergie et en particulier notre consommation d’énergie fossile. Elle prévoit également l’élaboration d’un plan de programmation des ressources comme composante d’une stratégie nationale de transition vers l’économie circulaire.

Élaborée en étroite concertation avec l’ensemble des parties prenantes, la feuille de route sur l’économie circulaire réaffirme les objectifs de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, et renforce et complète les mesures relatives à l’économie circulaire.

La feuille de route prévoit également, dans son action cinq, l'élaboration d'un plan de programmation des ressources jugées les plus stratégiques, accompagné d’une politique industrielle ambitieuse de valorisation du stock de matières, en particulier pour les métaux critiques, contenues dans les déchets.

La loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire crée de nouvelles filières de responsabilité élargie des producteurs, introduit de nouvelles interdictions relatives aux plastiques à usage unique et au gaspillage des produits invendus et de nouveaux outils pour soutenir les entreprises dans leurs démarches d’écoconception et accompagner les citoyens dans de nouvelles pratiques de consommation.

Le plan de programmation des ressources minérales

La transition bas-carbone nécessite l’adoption massive de technologies qui permettent de réduire les émissions de gaz à effet de serre, en particulier dans la production d’énergie et les transports. Or de nombreux travaux de prospective montrent que le déploiement de ces technologies s’accompagne d’une augmentation importante de la demande en ressources minérales, à la fois en volume, en variété, et en qualité.

Le ministère en charge de l’environnement s’est emparé de ce sujet dès 2018 puisque l’action 5 de la feuille de route sur l'économie circulaire d’avril 2018 prévoyait « d’engager, sur la base des travaux du comité pour les métaux stratégiques (Comes) et du premier plan national des ressources, un plan de programmation des ressources jugées les plus stratégiques en l'accompagnant d'une politique industrielle ambitieuse de valorisation du stock de matières, en particulier pour les métaux critiques, contenues dans les déchets ».

C’est dans ce cadre que la secrétaire d’État Brune Poirson a lancé en 2019 l’élaboration d’un plan de programmation des ressources minérales de la transition bas-carbone, portant sur quatre grandes familles de technologies bas-carbone : photovoltaïque, stockage stationnaire et réseaux (y compris réseaux intelligents), mobilité bas-carbone et éolien.

Pour chacune des quatre familles de technologies retenues, les travaux ont eu comme objectif d’approfondir la connaissance des filières technologiques matures ou susceptibles de l'être dans les dix ans à venir au regard :

  • des besoins en ressources minérales qu’elles mobilisent et des enjeux associés, économiques, géopolitiques, environnementaux et sociaux ;
  • des opportunités industrielles qu’elles présentent pour les entreprises françaises sur l’ensemble de leur chaîne de valeur, depuis l’extraction minière jusqu’au recyclage.

De ces quatre rapports thématiques, est issu un rapport de synthèse qui s’organise quant à lui en trois parties :

  • La partie I présente concrètement les différentes étapes des chaînes de valeur des technologies bas-carbone : procédés techniques, logiques économiques et impacts environnementaux et sociaux.
  • La partie II fait le point sur les différents risques identifiés sur l’approvisionnement en ressources minérales, qu’ils soient du côté de l’offre, de la demande, des structures des marchés concernés, ou qu’ils portent sur des enjeux sociaux et environnementaux.
  • La partie III présente les politiques publiques relatives aux ressources minérales déjà mises en place, et des recommandations destinées à limiter les risques et saisir les opportunités identifiées.

Le groupe d’experts sur les ressources (GIER)

La France participe depuis 2010 au groupe international d’experts sur les ressources.
Le travail de ce groupe vise à rassembler toute l’expertise scientifique disponible en matière d’exploitation, d’utilisation et de dégradation des ressources naturelles. Il formule des synthèses à l’attention des décideurs, afin qu’ils puissent anticiper et éviter les impasses de développement. En particulier, un fort accent est mis sur la nécessité de produire plus de richesses avec moins de ressources, en découplant les deux trajectoires.

La France finance le groupe international d’experts sur les ressources à travers une contribution annuelle et siège à son comité de pilotage. Le comité de pilotage oriente les travaux, en décidant des thèmes des futurs rapports, en fonction des besoins de connaissance des décideurs publics. Il donne son avis sur le périmètre et le contenu proposé pour chaque rapport avant sa rédaction proprement dite. Il incite les experts à formuler des messages, en particulier dans les résumés opérationnels, qui soient compréhensibles et utilisables par les décideurs. Ainsi, la France qui est fortement dépendante de ressources naturelles importées, au premier rang desquels les combustibles fossiles, mais aussi les métaux, peut-elle bénéficier d’une expertise de premier plan pour orienter au mieux ses travaux nationaux sur l’économie verte et l’utilisation des ressources.

Par ailleurs, des experts français apportent leurs connaissances scientifiques au groupe d’experts qui rédigent les rapports. Ils interviennent en fonction de leurs compétences propres et non comme représentants de leur pays.

Enfin, du 17 au 21 octobre 2022 la France a accueilli la 29ème réunion du GIER qui fêtait ses quinze années d’existence. Cette réunion a remporté un franc succès et a permis de riches échanges entre les experts de l'IRP, les décideurs politiques et les partenaires stratégiques notamment sur la publication du « Global Resources Outlook 2024 » qui devrait paraître début de l’année 2024.

L’alliance du G7 sur l’utilisation efficace des ressources

Créée par le G7 en juin 2015, l’alliance du G7 sur l’utilisation efficace des ressources est une plateforme d’échanges de bonnes pratiques tant privées que publiques qui a pour objectif de favoriser leur diffusion, voire leur généralisation.

Pour assurer la pérennité de cette alliance, les présidences successives du G7 se sont engagées à organiser des ateliers de travail sur différents thèmes en lien avec l’utilisation efficace des ressources. Une dizaine d’ateliers ont été organisés depuis le début de la création de l’alliance.

Les États membres du G7 se sont aussi engagés à mettre en œuvre des programmes d’actions ambitieux en matière d’utilisation efficace des ressources.

Deux rapports remis par le groupe international des experts sur les ressources (GIER) et l’OCDE demandés en 2015 par le G7 montrent notamment que des politiques d'utilisation efficace des ressources ambitieuses permettent de réduire le coût d'atteinte des objectifs climat de l'agenda de Paris et font des recommandations aux pouvoirs publics pour exploiter ce potentiel. Le potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre de politiques d’efficacité matérielle a été approfondi dans un rapport du GIER publié en 2020 dans deux secteurs : les bâtiments et la mobilité.

En 2019, la France a présidé le G7. A cette occasion elle a co-organisé, avec la Commission européenne deux ateliers de travail, l’un portant sur les chaînes de valeur circulaires et efficaces dans l’utilisation des ressources (mars 2019), l’autre portant sur les politiques d’allongement de la durée de vie des produits (novembre 2019).

Le G20 aussi se saisit du sujet

Le dialogue du G20 sur l’utilisation efficace des ressources a été créé sous présidence allemande en 2017. C’est le pendant de l’Alliance du G7 au niveau du G20. L’Allemagne a organisé une première réunion de ce Dialogue à Berlin en novembre 2017.

Après un premier atelier organisé par l’Argentine en 2018, le Japon a fait de l’utilisation efficace des ressources une des priorités de sa présidence du G20 en 2019. Le G20 a formalisé le fonctionnement du dialogue du G20 et élaboré une feuille de route composée d’un ensemble de thèmes sur lesquels un certain nombre de pays du G20 s’engageaient à jouer un rôle actif. Un atelier du Dialogue du G20 portant sur les plastiques a également été organisé.

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